Dans le prologue de ses lais, Marie de France invitait à dissiper les obscurités
des œuvres du passé en leur adjoignant un « surplus de sen ». La période
contemporaine a généreusement répondu à cet appel en s’attachant à relire,
réinterpréter, réactualiser les textes médiévaux sur toutes les scènes de la création
littéraire et artistique. Ces relectures créatives sont aussi le fait de propositions
critiques. Si de nombreux paradigmes interprétatifs se sont, à des degrés divers,
directement ou explicitement nourris des textes médiévaux (pensons par exemple à
la psychanalyse, à l’anthropologie structurale, à la sémiotique ou encore à
l’esthétique de la réception), les dernières décennies ont été marquées par l’essor
d’écoles ou de modèles qui se sont élaborés essentiellement en dehors d’eux –
notamment pour ce qui concerne les « studies » anglo-saxonnes – même si
plusieurs points de contact ont été trouvés et développés.

Tout en continuant à privilégier l’attention à la langue et à la fabrique des
textes, à leur poétique et leur esthétique propres, notre séminaire souhaiterait cette
année examiner la pertinence de ces nouvelles approches théoriques et critiques
(gender studies, queer studies, postcolonial studies, écopoétique, zoopoétique …) ou
perspectives de recherche (transmédialité, recherche-création, création critique …)
pour comprendre et faire vivre les productions littéraires médiévales. Comment
aborder ces œuvres en s’appuyant sur des paradigmes élaborés dans un ailleurs
culturel tel que certains peuvent conduire à en récuser la lecture ? Pour quels gains
d’interprétation, dans quels objectifs et pour quels publics ? Les textes anciens
peuvent-ils, en retour, venir alimenter ces paradigmes caractéristiques de notre
contemporain ? En somme, comment la littérature médiévale peut-elle encore être
une force de proposition dans le débat critique et continuer aujourd’hui à susciter le
« surplus » des lectures inventives ?