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Actualités latino-américanistes: agenda scientifique

  • [Séminaire]Programme de l'Atelier d'Études Transnationales (ADET), jeudi 17h-19h, avec le soutien de l'Institut des Amériques et les laboratoires CREW (EA4399), CRIAL (EA2052), et CREDA (UMR7227) de l'Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3
  • Appel à communications Colloque international (Paris, 20-21 novembre 2025): Gabriela Mistral ayer y hoy : entre lagar poético y recado político 

La commémoration des quatre-vingts ans de l'attribution du Prix Nobel à Gabriela Mistral, ainsi que l'anniversaire des cent ans de son premier séjour en France, sont des circonstances privilégiées pour l'organisation à Paris d'un colloque international intitulé « Gabriela Mistral ayer y hoy : entre lagar poético y recado político », les 20 et 21 novembre 2025, afin de célébrer cette très grande figure de la poésie écrite en espagnol, co-organisé par les universités Sorbonne Université, Paris 3 Sorbonne Nouvelle, Paris 8 Vincennes-Saint Denis, Paris Nanterre et avec le soutien de l’Ambassade du Chili.

Cette manifestation scientifique, qui sera la première en France, répond à la nécessité urgente de proposer une évaluation nouvelle et plus complète de l'œuvre poétique de Gabriela Mistral, ainsi que des apports de ses travaux et de sa pensée dans le domaine politique, social et culturel.

Il convient de rappeler qu'au moment où lui a été décerné le prix Nobel, qui couronnait pour la première fois l'œuvre d'un écrivain hispano-américain, et pour la première fois, une femme poète, la véritable dimension de la poésie de Gabriela Mistral n'était pas encore visible. L'on couronnait en effet « la poètesse de Desolación [...], la grande voix de la miséricorde et de la maternité », bien que Tala (1938), recueil puissant et complexe, ait déjà été publié. L'ensemble de sa production, surtout après la publication de Lagar (1954) et de Poema de Chile (posthume, 1967, réédité dans une version augmentée en 2015 et dans une autre version encore différente en 2020), va bien au-delà et dépasse même radicalement les valeurs conventionnelles qui lui sont assignées. De ce fait, notre tâche est de faire apparaître que cette œuvre est de celles qui laissent une empreinte – de celles qui comptent dans le devenir de la poésie contemporaine en langue espagnole, en raison de ses choix poétiques, des thèmes qu'elle aborde, de son langage novateur et d'une pratique d'écriture qui permet de penser autrement la relation entre la vie et l'art.

Nous souhaitons que soit conférée une importance bien plus grande à l'étude de l'œuvre poétique de Gabriela Mistral, souvent cachée derrière le filtre d'aspects biographiques et une perspective orientée par l'image projetée par sa personnalité publique. Il est vrai que nombre de travaux lui ont été consacrés depuis les années 80, à l'occasion du centenaire de sa naissance, en réponse à la nécessité de proposer des études se démarquant de celles de la figure stéréotypée – la maîtresse d'école exemplaire, la mère universelle, l'amante fidèle et soumise –, un dessein, il faut le dire, mené à bien durant les dernières décennies. Cependant, il reste encore à évaluer en soi la poésie de Gabriela Mistral : les ruptures qu'elle introduit face au modernisme précieux et à ses « paysages de culture » (Pedro Salinas), sa place au sein du post-modernisme hétéroclite où toute la topique fin de siècle est éclipsée par l'inauguration de modalités propres au XXe siècle, ainsi que le chemin singulier qu'elle trace en marge des impératifs dictés par les avant-gardes, sans cesser d'être moderne, mais depuis d'autres critères : l'austérité comme humus de sa parole, les affects qui agissent dans l'ordre du langage, une écriture qui est comme « le crissement de la lime sur le fil émoussé de la langue »[1], conçue comme un processus de récupération de restes venus de l'expérience et d'écritures antérieures, qui trouve sa meilleure expression dans le motif du « lagar », le pressoir, comme elle l'a elle-même suggéré. Le chemin en apparence solitaire que parcourt son œuvre ne l'est nullement en réalité. Gabriela Mistral se reconnaît comme une écrivaine qui appartient à une collectivité, celle des femmes qui rejoignent peu à peu la scène poétique, derrière Delmira Agustini, aux côtés d'Alfonsina Storni et de Juana de Ibarbourou : « Je me sens comme une vieille trompe emplie de ces voix autres ; je me sens comme un véritable fourreau de langages rassemblés, et c'est à peine si je possède pour l'instant cette chose plutôt vilaine que l'on appelle l'accent individuel, la voix qui n'a qu'un nom »[2], affirme-t-elle en 1938.

Nous sommes particulièrement requis par l'étude d'un geste créateur conscient de la subalternité et du poids de la norme sociale, qui déploie diverses stratégies discursives, finalement constitutives de la spécificité du langage poétique mistralien.

Si nous considérons qu'il est donc primordial d'offrir une évaluation critique de la poésie de Gabriela Mistral, elle ne peut être effectuée sans que l'on établisse des ponts entre le texte et son contexte, entre l'œuvre poétique et la relation que l'écrivaine entretient avec le monde et avec son époque. Et il y a plus encore, puisqu'elle ne s'est pas contentée d'écrire de la poésie, qu'elle ne s'est pas retirée pour ce faire du bruit du monde. C'est ici qu'interviennent ce qu'elle appelait recados, les notes qu'elle compilait pour ses missions à accomplir dans le monde et aussi les divers articles qu'elle publiait dans les journaux, ou les textes de ses nombreuses conférences. Sa trajectoire – sa décision de ne pas vivre dans son pays, son implication dans les causes humanitaires, ses prises de position contre le nazisme, le franquisme, le fascisme, son engagement pour les causes sociales et pour une éducation pour toutes et tous, son latino-américanisme et son indigénisme, ses préoccupations que l'on peut entendre comme proto-écologiques –, disent assez clairement combien ses options de vie ont manifesté un anti-conformisme face aux impératifs sociaux qui pesaient sur les femmes et  plus particulièrement sur les lesbiennes, et une conduite éthique qu'il convient de faire apparaître très clairement. En ce sens, ce colloque aspire à montrer aussi ces autres facettes qui ont contribué à faire de Gabriela Mistral une personnalité intellectuelle d'exception, comme sa présence sur la scène poétique mondiale et nationale, ou son travail et sa réflexion autour de l'éducation.

Enfin, l'un des autres enjeux de cette manifestation scientifique est l'exploration des vies et des prolongements postérieurs de son œuvre, du point de vue de sa diffusion internationale, de la question de sa réception en Europe (et plus précisément en France), et de l'examen des traductions qui ont été faites de ses écrits, sans oublier l'exploration des diverses œuvres poétiques, artistiques, critiques, qui entretiennent un dialogue avec elle.

Ce colloque s'adresse aux chercheuses et chercheurs, aux doctorant.e.s,  aux étudiant.e.s, à celles et ceux qui travaillent sur la littérature hispano-américaine et espagnole, sur la littérature générale et comparée, sur l'histoire de l'éduction, l'histoire intellectuelle et les études culturelles.

 

AXES DE TRAVAIL

1. Lectures critiques de la poésie de Gabriela Mistral, hier et aujourd'hui

2. Gabriela Mistral : figure publique, figure politique, dimension internationale 

3. Traces mistraliennes dans la poésie et les arts

4. La langue de Gabriela Mistral : Traductions et réappropriations

 

CALENDRIER

La date limite d'envoi des propositions (300 mots minimum) est le 15/03/25. Les frais de transport et de séjour sont à la charge des participants.

Le Comité d'organisation du colloque communiquera le résultat de ses évaluations le 15/04/ 2025. 

 

CONTACT: coloquiomistral@gmail.com

COMITÉ D’ORGANISATION

Sorbonne Université: Laurence Breysse-Chanet, Marianne Bloch-Robin, Irène Gayraud, Françoise Martinez, Ina Salazar

Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle: Hervé Le Corre, Mariana Di Ció

Université Paris 8: Claire Laguian

Université Paris-Nanterre: Stéphanie Decante

Ambassade du Chili en France: Diego del Pozo

 

UNITÉS DE RECHERCHE

CRIMIC, Sorbonne Université 

CRLC, Sorbonne Université 

CRIAL/ CRICCAL, Paris 3 Sorbonne Nouvelle 

Laboratoire d'Etudes Romanes, Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis

CRIIA, Paris-Nanterre

 

 [1]Texte lu par Gabriela Mistral l’Institut Vásquez Acevedo, à l’occasion du “Curso latinoamericano de vacaciones”, qui eut lieu à  Montevideo, Uruguay, en janvier 1938. 
[2] Ibid.



 

 
 
 

mise à jour le 10 mai 2025


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